Nouvelles pour Haine et Mélancolie, pour Rage et Amertume...

Trahi

Je suis là.


A attendre. Comme si le train pouvait faire marche arrière, comme si le passé pouvait revenir en s'excusant du désagrément.
Comme si le Destin pouvait payer les dommages et interêts.
Je ne peux m'empêcher de penser, alors que j'aimerais que ma salope de conscience se taise. Cette conscience contradictoire, paraoxale, toujours à me laisser en plan quand il ne faut pas, toujours à changer de parti quand il faut argumenter le débat.
Je pense à cette idée que j'ai eu de parler à cette fille agenouillée au pied d'un arbre. Je pense à l'idée qui se transforme en dialogue, et le dialogue en amitié. Et l'amitié qui mûrit.
Ma conscience revient à a charge. Tu veux pas la fermer? Je sais que je suis émancipé sans elle, que je peux explorer le monde, que ce feu qui brûle dans mon corps ne peut être que bénéfique. Mais si tu est la science infuse, conscience, dis-moi: Pourquoi sans elle...

Je me sens si mal?



Je Suis la Panthère

Je me lève doucement, crispé, et plonge mon regard dans celui de la panthère noire.
Elle est campée sur ses pattes, sa musculature souple s'agite sous sa fourrure. Son regard sauvage me transperce. Je sens sa colère qui passe de son esprit au mien. Elle coule comme un source d'énergie pure dans mes prunelles.
Je lui renvoie son regard.
J'oublie tout ce que je sais, et m'abandonne à son sentiment, je n'admire plus son corps majesteux, je l'évalue. Je ne pense plus qu'à me jeter sur elle, pris dans un sentiment de sauvegerie tribale.
Sa bouche s'ouvre et j'entrevois ses crocs d'une blancheur d'albâtre. Sa respiration se fait plus intense, et un grognement sourd monte du fond de sa gorge. Elle va attaquer. Elle va bondir sur moi, toutes griffes dehors, lèvres retroussées pour mieux enfoncer sa mâchoire dans ma nuque. Je le sais, je le sens. Mes pensées ont disparues. Il ne reste plus que l'instinct.
L'instinct de mort.
Je me mets dans le même position que la bête, et tire mes muscles faciaux en une grimace bestiale. La panthère rugit. Les oiseaux s'envolent, effrayés. Je ne bouge pas, oubliant la peur.
Je m'abandonne à cette rage sombre et audacieuse.
Je fais face à la reine noire.
Et je rugit.
Nous bondissons, à l'unisson, et nos corps s'entrechoquent brutalement. Nous nous écrasons lourdement sur le sol, le souffle coupé. La bête lacère mon corps de ses griffes, et je retiens sa tête d'une main, la rouant de coups de poing de l'autre.
Nous ne faisons plus qu'un. Une âme noire sans cesse en confrontation, scindée en deux parties. L'une d'origine sauvage, puissance suprême, et l'autre native de la civilisation, oubliant tous ses principes pour retourner à l'état simiesque.
Je sens les crocs qui cherchent ma gorge, ruisselants de sueur, de salive et de sang. Je tente de résister à cette force que l'on m'oppose, mais je cède du terrain peu à peu. Les dents se rapprochent inexorablement de mon visage.
La bête plonge de nouveau son regard dans le mien. Un regard pour dire que c'est fini, que j'ai perdu. Un regard qui compatit, qui me dit que je me suis bien battu pour sauver ma vie, et que je mérite tous les honneurs. Je ne serais pas sa proie, juste son prédateur rival.
Des vestiges de mon esprit civilisé tombent dans mon esprit tourbillonnant. Je pense au Seigneur, et au Destin, qui a mis cette force de la nature sur mon chemin. Puis je renie l'existence d'une entité supérieure, me laissant de nouveau tomber dans cet ouragan noir qui me rend si fort.
Dieu n'existe pas. Dieu est mort quand cette nouvelle part de moi s'est mise à exister. Quand je suis devenu cette incarnation de la rage. Je me suis transformé en une force primitive, et plus puissante que n'importe quelle créateur, juge, cosmos ou prophète. Je suis un monstre sanguinaire qui a combattu jusqu'à la mort.
Le sourire aux lèvres, je lâche prise et savoure cette douleur sourde et brûlante quand la panthère me mord à la carotide.
Et, mes yeux posés sur les siens, je meurt.